Pour les uns je suis lucide...
Pour les uns je suis lucide…
Pour les uns je suis lucide
Pour les autres un incurable déçu
De ma vie errante apatride
A la recherche d’un improbable issu.
Durant ces quarantaines d’années
J’ai consacré la plupart de mon temps
A vouloir tant cherchés
Comme Sisyphe qui dégringole en son temps
Enfant, j’ai vécu dans le temple bouddhique
Où j’ai appris la culture classique
La vie de moine me tentait
Je voulais tant essayer
J’ai connu Phnom Penh en effervescence
C’est au lendemain de l’Indépendance
Les gens espéraient d’un monde meilleur
Et on parlait de l’amour et du bonheur
Je sortais de mon enfance
Je ne comprenais encore rien à la vie
Mais je rêvais d’avoir une chance
De partir loin pour faire ma vie.
A Paris j’ai connu les événements de Mai
Les jeunes manifestaient en chantant
Pour un monde de justice et de paix
J’avais déjà plus de vingt ans.
J’ai connu la vie étudiante
Grâce à la lecture et des amis de toutes les couleurs
C’était la période d’insouciance et de bonheur
Et du lendemain qui chante.
Au temps des khmers rouges amers
J’ai dû beaucoup souffert dans les camps durant quatre ans
Mais j’ai pu en finir parmi les rares survivants
Pour entrer tout droit dans un autre enfer.
J’ai vu le Cambodge meurtri
J’ai vu les soldats étrangers
J’ai appris que presque tous les miens avaient péri
Je n’avais plus de force de pleurer.
Aujourd’hui plus de dix ans passés
Je suis à nouveau à l’étranger
Loin du pays de mon enfance
Pour recommencer une nouvelle chance.
J’ai commis souvent des erreurs
J’ai fait des choses qu’il ne fallait pas faire
J’ai dit des choses au lieu de me taire
Mais dans l’ensemble je crois quand même j’ai un bon cœur.
J’ai essayé de me libérer
De tout le mal qu’on m’a fait
A beaucoup je dis merci
D’avoir m’aider à rester en vie.
J’ai été heureux et j’ai beaucoup souffert
C’est la mélodie secrète de la vie
J’ai beaucoup de choses encore à comprendre
Pour le restant de ma vie.
Une femme partage ma vie
Ces années durant
Je veux lui dire un grand merci
De m’avoir supporté aussi gentiment.
A côté de nous nos deux filles
Elles sont nos adorables fleurs
Qui parfument notre demeure
Pour la continuation de la vie.
Ong Thong Hoeung
Bruxelles, le 25 octobre 1994
Merci pour ce nouveau message plein de gentillesse. Je ne me vois pas autant de qualités que ce que tu me décris…je pense que tu me surestimes… !
Ton amitié m’est très précieuse à moi aussi ; nous avons vraiment cheminé l’un et l’autre, l’un par l’autre, depuis qu’on se connaît !
Je viens de réécouter le CD que tu as enregistré ; à chaque écoute, il me touche ; je viens d’en faire des copies pour mes filles.
Ton témoignage est vraiment important. Par lui, tu remets de la Vie là où il n’y en n’avait plus, tu fais revivre tous ces disparus, tu éveilles la conscience de ceux qui ne connaissaient pas ce drame, tu touches par ton authenticité et ta sensibilité, tu touches par ta tolérance et ton amour universel.
Tu as pu cueillir des fruits de ce magma d’horreurs que tu as connu.
De cette vie, dont tu ignorais pourquoi on te l’avait laissée, tu as fait du Beau, du Bon et ton rayonnement plein de sagesse réchauffe, apaise, ouvre à la réflexion, attire la sympathie, l’attachement.
Tu as transformé ce magma en quelque chose de fécond. Tu peux être fier de ta vie.
Pour tout cela, je suis dans la gratitude. Je remercie Dieu pour ton cheminement et je Le remercie de m’avoir conduit sur ta route.
Merci Ho. Merci de ce chemin et merci de nous le faire partager.
Faites un beau voyage et prenez bien soin de vous !